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L'Entrepreneur et la Plume

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Patrons le jour, écrivains la nuit, leurs ouvrages ne seront peut-être pas les best-sellers de demain, mais ils sont loin d'être inintéressants. Rencontre avec ces auteurs d'un autre genre.

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@ OLGALIS/FOTOLIA/LD

Thierry Breton, Louis Schweitzer, Pierre Suard, Pierre Bilger, Carlos Ghosn mais aussi Thibault Lanxade, Emmanuel Pierrat, Christian Oyarbide... Tous ces dirigeants ont un point commun: ils sont également écrivains. Les premiers sont certes plus «bankables» que les seconds. Mais il n'empêche, les uns et les autres fourbissent leur clavier pour coucher des mots sur l'écran et les publier. Leurs motivations? «L'amour des livres, des mots, l'envie de transmettre un savoir», explique Emmanuel Pierrat, dirigeant du cabinet d'avocats parisien Pierrat et auteur d'une cinquantaine d'ouvrages de droit, d'essais, de romans, de livres d'artTroublé de l'éveil, Fayard, 2008, 14 Euros. Les Pommes libertines, avec Richard Conte, Bernard Pascuito Editeur, 2008, 15 Euros.... et la liste est encore longue. Pour Christian Oyarbide, directeur général de La France Mutualiste et auteur de Mon boss, ses trucs et ses ticsBourin Editeur, 2007, 11 Euros. mais aussi de Histoires peu ordinaires au Cap FerretAvec Michel Poux, Elytis, 2006, 13 Euros., c'est également un «plaisir, une distraction qui permet de s'évader de l'univers professionnel». Pourtant, il serait impensable pour ces chefs d'entreprise d'écrire sans avoir une vie professionnelle à côté. Leur inspiration, ils la puisent dans leur vie quotidienne. Pour ses Nouvelles brèves de prétoireChiflet & Cie, 2008, 10 Euros., maître Pierrat s'inspire bien évidemment de ce qu'il entend au quotidien dans la salle des pas perdus du palais de justice. «Mon poste me permet d'observer et de m'imprégner du comportement de mes salariés, de mes clients, de mes fournisseurs. Observer leur manière de s'habiller, de bouger, de s'exprimer me sert énormément dans l'écriture de mes livres», plaide l'avocat, prolixe. Pour donner vie au personnage de Marica, une bourgeoise de droite qui ne jure que par Nico, Thibault Lanxade, coauteur de Neuilly Auteuil PoitouEditea, 2007, 20 Euros. et dirigeant de l'établissement de paiement Aqoba, n'a eu, lui aussi, qu'à ouvrir les yeux...

Peut-on tout écrire? «Il ne faut surtout pas raconter sa vie, car elle n'intéresse personne», martèle Christian Oyarbide. Quant à s'épancher sur des sujets plus osés comme la politique ou l'érotisme... mieux vaut y aller à pas comptés. «Avant de me lancer dans des romans érotiques ou dans des bouquins sur l'art tribal, j'ai d'abord publié des ouvrages en rapport avec ma sphère professionnelle. Faire l'inverse aurait été suicidaire», reconnaît Emmanuel Pierrat qui, aujourd'hui, alterne ouvrages sérieux et désinvoltes.

Mais toujours en dehors de ses heures de boulot. En effet, être «patron-écrivain» est loin d'être de tout repos. Selon les rythmes biologiques de chacun, ils écrivent plutôt le soir, la nuit, tôt le matin, d'une traite pendant les vacances, les week-ends... Emmanuel Pierrat se fixe par exemple un planning d'écriture très précis. Sinon, impossible de venir à bout des manuscrits. Et n'allez pas croire que les premiers jets sont les versions définitives. Loin de là. «On a mis à peine trois semaines à écrire notre roman. Ensuite a commencé le long et fastidieux travail des relectures, des rerelectures, etc.», se souvient Thibault Lanxade. Christian Oyarbide reconnaît laisser reposer ses textes parfois pendant six mois avant de «repasser 10, 20 voire 30 fois dessus» (lire le témoignage). Et quand il fait relire ses pages à son entourage, il tient compte de leurs critiques. «Pas toujours facile à accepter mais nécessaire.» Pour Emmanuel Pierrat, le pire, c'est l'«absence de remarques». Cela veut souvent dire que le livre ne trouvera pas son public.

EMMANUEL PIERRAT, dirigeant du cabinet d'avocats Pierrat

«Mes ouvrages font la publicité de mon cabinet

Il ne faut pas perdre de vue que l'ambition de tous ces «patrons- écrivains» est d'être lus par le plus grand nombre. Et pourquoi pas, que cela ait des répercussions sur le business, comme l'avoue Emmanuel Pierrat: «Notre profession est interdite de publicité, donc mes ouvrages servent à faire parler de moi et de mon cabinet. Cela peut faire la différence». Thibault Lanxade est plus nuancé: «j'écris par pur plaisir et sans arrière-pensée. Je n'essaie pas de faire passer un message particulier.» Pour Christian Oyarbide, porter la double casquette de patron-écrivain n'est pas un problème car «il n'y a pas de contradiction entre ce que j'écris et ce que je suis». Au quotidien, il assume... mais pas au point de distribuer ses livres à ses salariés. «Je sais que certains les achètent mais ils n'osent pas m'en parler», s'amuse- t-il. Tout le contraire d'Emmanuel Pierrat, qui distribue un exemplaire à chacun de ses collaborateurs. «S'ils veulent fayoter, ils sont obligés de les lire, s'amuse-t-il. C'est une bonne chose car cela force ceux qui n'aiment pas lire à le faire.» Gageons que les salariés du cabinet Pierrat auront encore beaucoup de fiches de lecture à rédiger. Leur patron prépare en effet un livre sur les grandes énigmes de la justice et un ouvrage sur la profession d'avocat. Thibault Lanxade réfléchit, quant à lui, à une pièce de théâtre et Christian Oyarbide à une BD sur le management et un polar sur... le management.

3 QUESTIONS A... JEAN-LOUIS MULLER, directeur à la Cegos et directeur de collection



«Un sujet polémique est plus vendeur»
- Faut-il signer sous un vrai nom ou utiliser un pseudo?
Tout dépend du but de l'auteur. S'il écrit pour gagner en notoriété, il a tout intérêt à signer de son vrai nom et à diffuser son ouvrage à ses salariés, clients... S'il écrit pour son plaisir, un pseudonyme peut convenir.
- Un sujet consensuel ou décalé?
Ecrire sur un sujet qui met tout le monde d'accord revient à ne prendre aucun risque, mais aussi à ne pas retenir l'attention des médias, donc à rester dans l'ombre. Opter pour un sujet polémique et décalé est plus risqué mais plus vendeur. En ces temps moribonds, le décalage paie...
- Doit-on faire relire le manuscrit à des «critiques» ou à des «béni-oui-oui»?
Rien de pire que les gens qui, après lecture du manuscrit, ne vous font que des éloges, ne trouvent aucun défaut à votre prose. Les relecteurs, qu'ils fassent partie de l'entourage ou pas, doivent formuler des critiques constructives et chercher la petite bête.

A LIRE

> ECRIRE UN ROMAN, SE FAIRE PUBLIER Bob Mayer, Emmanuelle Debon, Emmanuel Plisson, Eyrolles, 2008, 20 Euros.
> COMMENT DEVENIR UN BRILLANT ECRIVAIN... ALORS QUE RIEN (MAIS RIEN) NE VOUS Y PREDISPOSE Alyosius Chabossot, Milan, 2008, 14 Euros.
> COMMENT ECRIRE VOTRE PREMIER Livre Bernard Baudouin, Ambre, 2007, 20 Euros.

TEMOIGNAGE
En trois semaines, le premier était bouclé
THIBAULT LANXADE, directeur général d'Aqoba et auteur de Neuilly, Auteuil, Poitou

«Tout est parti d'un challenge entre amis autour d'une bonne bouteille de Bordeaux.» C'était à Noël, en 2006, la campagne présidentielle battait son plein. Thibault Lanxade, directeur général de l'établissement parisien de paiement Aqoba se met au défi, avec son ami Alex Wilson, d'écrire un roman qui serait un portrait social caricaturé de deux Français, l'un votant à gauche, l'autre à droite. En une heure, le plan de Neuilly, Auteuil, Poitou est écrit. Durant les vacances mais aussi très tôt le matin, chacun s'attelle à la tâche. En trois semaines, le premier jet de l'ouvrage est bouclé. Commence alors le long boulot de relecture et de réécriture. Le livre sort le 1er mars 2007. Interviews et émissions de télé s'enchaînent.
On lui demande comment il a bien pu trouver le temps d'écrire, s'il y a un message particulier derrière ce roman. Réponse de l'intéressé: «Je l'ai fait par pur plaisir». Quid des retombées sur le business? «J'ai réussi quelque chose sur le plan extraprofessionnel, cela prouve que je suis un peu créatif et ouvert d'esprit. Mais il faut relativiser. Notre livre est resté très parisien, et nous avons eu peu de temps pour le commercialiser avant l'élection», détaille Thibault Lanxade. Depuis, l'auteur a rédigé d'autres ouvrages sur les jeunes et l'entreprise et travaille à l'écriture d'une pièce de théâtre. «L'histoire d'un patron de PME qui aspire à une reconnaissance nationale et qui travaille son image pour cela.» A suivre...
AQOBA - Repères
- ACTIVITE: Emetteur de moyens de paiement
- FORME JURIDIQUE: SAS DIRIGEANT: Thibault Lanxade, 37 ans
- ANNEE DE CREATION: 2008
- EFFECTIF: 15 personnes
- CA 2007: 59 000 Euros

 
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Sylvie LAIDET

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