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Les clauses du contrat de travail pour préserver le patrimoine de l'entreprise

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Les clauses insérées dans un contrat de travail sont trop souvent négligées. Pourtant, elles peuvent préciser et compléter les règles applicables entre l'entreprise et ses salariés. Tour d'horizon des différentes clauses.

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Le patrimoine de l'entreprise, tant matériel qu'immatériel, est particulièrement exposé s'il n'est pas valorisé et protégé par le biais de stipulations adéquates dans le contrat de travail.

Me Isabelle Pinto et Me Jean-Marie Léger Avocats associés chez FLP Avocats

FLP Avocats, cabinet dédié au droit des affaires, intervient tant en conseil qu'en contentieux, en droit social individuel et collectif, en droit des sociétés, en droit commercial et en droit de la communication et des technologies de l'information. Rens.: www.flpavocats.com

I/ Principales clauses visant le patrimoine matériel

- Matériel informatique

L'utilisation par le salarié du matériel informatique de l'entreprise à des fins personnelles est généralement tolérée. Une interdiction absolue, bien que théoriquement possible, peut s'avérer illusoire. Néanmoins, l'utilisation à titre privé doit rester raisonnable. Il a été ainsi jugé que des connexions à des fins privées de 41 heures sur un mois (Cass. Soc, 18 mars 2009) justifiaient le licenciement du salarié. La notion d'usage raisonnable étant floue, le contrat de travail peut réglementer ce point ou renvoyer à la charte informatique de l'entreprise. Il peut rappeler que le matériel et les communications sont présumés professionnels. La faute peut aussi résulter de la nature des messages ou des sites consultés. L'employeur peut donc contrôler les connexions internet de son salarié hors sa présence (Cass. Soc, 9 juillet 2008 et 9 février 2010). De même, sauf s'ils sont expressément identifiés comme personnels, les e-mails sont présumés professionnels (Cass. Soc, 15 décembre 2010). Ils peuvent être contrôlés par l'employeur. Tel n'est pas le cas, donc, pour les messages personnels. L'employeur ne peut pas y accéder, y compris si l'utilisation non professionnelle de la messagerie est interdite. L'employeur se rendrait alors coupable de violation du secret des correspondances (Cass. Soc, 2 octobre 2001). On voit ici les limites d'une clause prohibant tout usage privé.

- Téléphone

De même que pour les connexions Internet, l'usage abusif d'un téléphone peut constituer une cause de licenciement (Cour d'appel de Paris, 11 septembre 2008). Dans cette affaire, la faute grave a été retenue dès lors que le salarié avait permis à des tiers à l'entreprise d'utiliser sa carte téléphonique professionnelle en leur communiquant son code confidentiel. L'employeur est d'autant plus justifié à sanctionner un salarié indélicat qu'il a pris soin de définir précisément dans le contrat de travail les limites et modalités d'utilisation des moyens de communication mis à sa disposition.

- Clause relative au véhicule de fonction

Lorsqu'un employeur met un véhicule à la disposition permanente d'un salarié, il s'agit d'un avantage en nature à hauteur de l'utilisation privée que celui-ci en fait. La clause précise les limites d'une éventuelle utilisation privée ou la prohibera si nécessaire. Pendant une période de suspension du contrat de travail, sauf stipulation contraire de ce dernier, le salarié ne peut se voir retirer le véhicule de fonction dont il conserve l'usage dans sa vie privée (Cass. Soc, 24 mars 2010). A noter que la retenue sur salaire pour le remboursement des contraventions est illégale, y compris si le contrat de travail prévoie une telle retenue (Cass. Soc, 11 janvier 2006).

- Clauses relatives aux fichiers et données

Les documents détenus par un salarié sur son lieu de travail, sous forme papier ou informatique, sont présumés professionnels et peuvent être librement consultés par l'employeur (Cass. Soc, 18 octobre 2010). Là encore, s'ils sont identifiés comme personnels, l'employeur ne peut en prendre connaissance qu'en présence du salarié, ou bien si celui-ci est dûment appelé (Cass. Soc, 17 juin 2009). Il n'est pas inutile d'énoncer cette règle dans le contrat de travail, lequel a également une vocation pédagogique et informative.

CE QU'IL FAUT RETENIR

- Certaines clauses sont indispensables pour clarifier des éléments mal définis par le droit du travail, d'autres restreignent le champ des possibles pour le salarié.
- Vous pouvez insérer des clauses limitant l'usage privé des moyens de communication, mais l'interdiction est illusoire.
- Pour être valides, certaines clauses doivent obéir à des conditions de fond et de forme. Par exemple, la clause de non-concurrence doit être justifiée par les intérêts de l'entreprise, être limitée, tenir compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporter une contrepartie financière.

II/ Les principales clauses touchant au patrimoine immatériel

Le patrimoine immatériel comprend l'ensemble des données, informations, connaissances, savoir-faire et droits de propriété intellectuelle attachés aux différentes activités et fonctions de l'entreprise. Au sens large, il inclut également la clientèle.

- Clause de discrétion et de confidentialité

L'obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail implique une obligation générale de discrétion, interdisant la communication à un tiers de toute information confidentielle. Cette obligation, inhérente au contrat de travail, existe indépendamment d'une disposition expresse du contrat. Une clause permet cependant de rappeler au salarié cette obligation et d'en préciser l'étendue. Elle est nécessaire si l'obligation de confidentialité doit se poursuivre au-delà de la cessation du contrat de travail (Cass. Soc, 19 mars 2008).

- Obligation de secret

Si le code du travail punit de deux ans d'emprisonnement et d'une amende de 30 000 euros le fait, pour un salarié, de révéler ou de tenter de révéler un secret de fabrication, le savoir-faire ne fait l'objet d'aucune protection légale particulière. Or, il couvre un domaine plus large que le secret de fabrication, généralement défini comme un procédé de fabrication offrant un intérêt pratique et commercial mis en oeuvre par un industriel et tenu caché par lui à ses concurrents. Il ne couvre que des procédés techniques et s'apparente en cela à l'invention brevetable. Du fait de cette définition restrictive, d'importantes valeurs immatérielles, tels que les secrets commerciaux, ne sont pas protégées par le code du travail. Une clause est ici indispensable. Elle doit définir précisément le savoir-faire que l'entreprise entend protéger. Cette définition permet également de distinguer le savoir-faire propre à l'entreprise de celui détenu par le salarié. La clause précise sa durée, les interdictions de divulgation et, le cas échéant, les sanctions encourues telles qu'un forfait de dommages et intérêts. La définition du savoir-faire propre à l'entreprise est d'autant plus importante qu'il ne peut pas être reproché au salarié d'utiliser, au service d'un nouvel employeur, un savoir-faire relevant de compétences techniques générales et une expérience acquise qui lui appartient en propre puisqu'elle est le fruit de sa capacité à faire fructifier son potentiel professionnel et ses connaissances personnelles (Cour d'Appel d'Angers, 14 juin 2011). L'entreprise pourra en revanche interdire à son salarié d'utiliser ses compétences au service d'un concurrent par le biais d'une clause de non-concurrence.

- Clause de non-concurrence

En l'absence d'une clause de non-concurrence, le salarié est libre, une fois son contrat de travail rompu, d'exploiter son savoir-faire, le cas échéant, au détriment de son ancien employeur. Si vous souhaitez en inclure une dans un contrat de travail, sachez que, pour être valide, elle doit répondre à des conditions strictes. L'interdiction doit être justifiée par la protection légitime des intérêts de l'entreprise. Les fonctions du salarié doivent exposer son employeur à un risque réel de détournement de clientèle. En outre, cette clause doit être limitée dans le temps et l'espace, tenir compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporter une contrepartie financière. Dès lors que cette compensation s'impose à l'employeur, il est prudent qu'il se réserve la faculté de renoncer au bénéfice de l'interdiction de concurrence. Mais la validité de cette faculté de renonciation est également encadrée par la jurisprudence, notamment, quant au délai pendant lequel elle peut être mise en oeuvre.

- Transfert de droits d'auteur

La question du transfert à l'employeur des droits patrimoniaux d'exploitation attachés aux créations réalisées par des salariés est épineuse. En effet, le code de la propriété intellectuelle (CPI) dispose expressément que la conclusion d'un contrat de travail n'emporte pas cession à l'employeur des créations réalisées par un salarié, fut-il rémunéré pour une activité créative. Il existe peu d'exception à ce principe. Par exemple, le CPI prévoit la dévolution à l'employeur des droits d'auteur sur les logiciels développés par ses salariés. Par ailleurs, certains mécanismes propres au droit de la propriété intellectuelle, telle que la notion d'oeuvre collective, autorisent parfois l'entreprise à revendiquer la propriété d'oeuvres créées par ses collaborateurs. En dehors de ces exceptions et mécanismes, l'appropriation par l'employeur des droits d'auteur des salariés créateurs reste subordonnée à l'existence d'une clause de cession. Cette clause précise notamment les missions créatives du salarié, la nature des droits cédés, l'étendue des exploitations autorisées, la durée de la cession ainsi que la rémunération correspondante. Le plus souvent, celle-ci est incluse dans le salaire versé.

- Clause relative au brevet d'invention

Le code de la propriété intellectuelle comporte un mécanisme de cession automatique à l'employeur des inventions faites par le salarié dans l'exécution de son contrat de travail. Cette cession est toutefois subordonnée à l'exercice de fonctions impliquant une mission inventive. Le CPI comporte également un mécanisme permettant à l'employeur de se faire attribuer la propriété ou la jouissance de droits attachés à des inventions faites par ses salariés dans des circonstances autres que l'attribution expresse d'une mission inventive. A défaut de convention collective ou d'accord d'entreprise déterminant la rémunération supplémentaire à laquelle peut prétendre le salarié, elle sera déterminée par une clause du contrat de travail, laquelle définira également les missions inventives confiées au salarié.

 
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ISABELLE PINTO, JEAN-MARIE LEGER

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