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Créer un site marchand : pas forcément l'eldorado pour une enseigne

Publié par Denis Caminade le | Mis à jour le

Voyant leur territoire grignoté par l'e-commerce, les enseignes n'ont pas tardé à réagir en ouvrant leur propre site marchand. Les résultats sont décevants, car l'on assiste plus à un jeu à somme nulle – les nouveaux sites s'annulent les uns les autres – qu'à une remise en cause des positions fortes des sites leaders, souvent pure players.

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La conquête de cet e-eldorado semble se repousser de jour en jour...

Plusieurs problématiques apparaissent "en toile de fond" pour les enseignes : le positionnement de leur offre, la difficulté de penser et de faire vivre un site marchand, la notoriété et l’image et donc l’attractivité de l’enseigne relayée par le référencement et le display pour créer du trafic vers leur site, sans oublier le tassement de la progression du commerce on line. Tout l’enjeu est là : identifier là où cela se passe mal, alors que par réflexe, par facilité, et par peur de s’avouer ses faiblesses stratégiques et ses erreurs de manoeuvre, l’entreprise commerçante aurait vite tendance à rejeter la faute sur cette mauvaise conjoncture - "il n’y a plus d’argent en France !" - et sur ce consommateur insaisissable qui serait parti vivre sur la planète web entre Facebook et Twitter…

La "crise" extrêmise les situations : les forces et les faiblesses s’accentuent, et les leaders creusent l’écart avec les suiveurs…

La crise dure et s’installe : les 3,4 ou 5 % de croissance annuelle font partie de l’histoire ancienne et au mieux peut-on espérer à l’avenir des taux de croissance autour de 1 à 2 % pour nos futures meilleures années. Ecraser les coûts, baisser les prix et plier l’échine en attendant des jours meilleurs revient donc à se cacher les problèmes de fond plutôt que de les affronter, et à ne pas décider des changements qui s’imposent. En quelque sorte une forme d’immobilisme – masqué par les manoeuvres d’économies et de promotions pour ‘s’adapter à la crise’ - dans un monde en plein mouvement. Pourtant les positions se contractent, et nul besoin d’être grand stratège pour saisir que si par exemple la mode marque le pas, ce n’est pas le cas pour des enseignes comme Zara, de même pour la décoration maison où des enseignes comme Maisons du Monde prospèrent : un positionnement judicieux de l’offre (une gamme adaptée, large, moderne, avec des vrais partis pris, des prix corrects et non pas les plus bas) permet de tirer son épingle du jeu, et plus encore de gagner beaucoup d’argent même en périodes difficiles.

Plus que jamais, l’offre doit être revisitée pour être plus attractive, mais pas seulement

Créer un site marchand ne résout donc pas cette première quadrature du cercle vendeur : proposer une offre bien positionnée, réellement attractive, qui ne mise pas prioritairement sur l’avantage prix. En effet, la chaîne de magasins doit supporter des coûts supplémentaires à ceux des pure playeurs qui pour exister et émerger sur la toile ont réduit leurs marges au maximum, et vouloir les combattre sur le seul argument prix serait donc perdu d’avance. L’attractivité exercée heureusement peut se situer ailleurs : l’originalité de l’offre, sa présentation, son accès simplifiée, sa fluidité, son couplage à des services spécifiques, la relation qu’elle établit avec l’acheteur, l’image qu’elle véhicule, la confiance qu’elle inspire…

Spécifiquement aux enseignes qui ont opinions et magasins sur rue ou sur allée de centres commerciaux se pose la question de la concordance entre les magasins physiques et le magasin virtuel que représente leur site. Un site bas de gamme tire l’enseigne et ses magasins vers le bas, ce qui est rarement bon à terme. C’est souvent le cas, lorsque le franchisé, déçu de ne pas voir arriver le site de sa chaîne, crée le sien dans son coin avec ses petits moyens et hélas son mauvais goût, et nuit considérablement à l’ensemble des magasins : il doit être vite stoppé et si nécessaire exclu de la chaîne pour éviter une dégringolade générale. Un site haut de gamme à l’inverse tirera l’image vers le haut, ce qui est toujours préférable en terme d’attractivité (sauf pour le low cost), sous réserve de ne pas décontenancer le public avec une atmosphère qui fait le grand écart avec les magasins : la filiation site/magasin doit être directe et évidente, même si sur la toile une enseigne peut se permettre de se doter d’une image plus jeune et plus innovante pour coller davantage au média internet, et mieux se mesurer aux concurrents.

Une démarche full commerce® à initier

Pour aller plus loin, dans une démarche full commerce®, c’est toute la relation entre le site web et l’appli smartphone, les points de contact sur la toile, l’appli en magasin qui peut permettre d’agrandir les murs du magasin et d’appuyer la démarche du conseil, et le magasin lui-même qu’il s’agit de dynamiser. L’enjeu va beaucoup plus loin que la mise en service d’un site, et réclame compétences et travail pour la conception et la production des outils, avec un suivi assez lourd pour leur fonctionnement au quotidien. Les objets virtuels inanimés n’ont pas d’âme, il faut donc prévoir de les animer en continu pour qu’ils attirent. Là encore difficile de faire l’impasse sur un accompagnement extérieur suffisamment créatif pour nourrir l’ensemble de la chaîne web to store.

65 à 75% des démarches d’achat en ligne se terminent avant la commande : les sites créés fonctionnent mal.

Mis à part quelques grandes chaînes habituées à dépenser des millions d’euros en communication et qui n’ont pas lésiné sur les moyens à investir en digital, beaucoup de sites même récents ont été réalisés à l’économie, sans prendre en compte que pour aller tenter sa chance sur le terrain des tenants historiques et expérimentés du marché, il fallait faire aussi bien, voire mieux qu’eux ! D’où, les piètres résultats enregistrés. On constate majoritairement l’absence de spécificité du site où l’enseigne paraît interchangeable, la navigation trop peu fluide et intuitive (64% des clients ont le sentiment de perdre du temps à effectuer certaines tâches sur le site*) souvent sous prétexte d’imposer un parcours client qui maximiserait le panier d’achat, des informations difficiles à trouver (59% des clients s’en plaignent*), un manque de clarté et de transparence dans le SAV, et des démarches de retour et de remboursement complexes. Un grand besoin de simplicité et de cohérence ressort, sans pour autant donner dans le site basique peu engageant : la composante image est devenue primordiale. Que faire ? Changer de paradigme et revoir sa copie avec des agences de communication expertes en commerce qui sauront vous conseiller sur la marche à suivre pour corriger ces errements.

Quant à la grande problématique du trafic, les lois publicitaires restent incontournables : soit on joue à court terme avec en permanence des actions promotionnelles et on ne construit pas l’avenir ni l’image de la marque forcément malmenée par autant d’offres prix, en clair, on fait des ventes à court terme mais sans garantie sur le lendemain, soit on construit un vrai contenu de marque et chaque action nourrit la précédente et la suivante, et la notoriété et l’image se créant durablement, le trafic ‘naturel’ existe et perdure en dehors de toute action push. Un mix des 2 semble inévitable, mais trop peu d’enseignes l’ont compris et leur discours de marque reste inaudible voire inexistant. Là encore, une approche experte de référencement et de notoriété et d’image de marque avec une agence spécialisée est plus que conseillée.

Stagnation du CA du e-commerce annoncée pour 2017

Le e-commerce désormais touché par le ralentissement ambiant invoque aussi la cause conjoncturelle, et nouvel argument exogène à l’entreprise e-novante, la frilosité du consommateur qui ne se décide toujours pas à payer sa baguette avec son smartphone et à se laisser géo-tracé-tracké-traqué dans tous les coins pour être bombardé de promotions et d’offres évidemment exceptionnelles.

Il s’agit là encore de se rassurer en déplaçant le problème plus loin, la crise ou le conservatisme moral et comportemental des Français, pour éviter de se poser les vraies questions. Pourtant les chiffres ne manquent pas d’éloquence : il y a 120.000 sites marchands en France, mais seulement 800 d’entre eux réalisent plus de 10.000 transactions par mois (à 90€ en moyenne, cela correspond à un CA annuel supérieur à 11 millions d’euros), et 40 sites leaders représentent le quart des volumes vendus, que risque-t-il d’advenir de 94% des sites marchands réalisant moins de 1000 transactions mensuelles, soit moins de 90.000 € par mois? La partie semble mal engagée, et si l’on regarde en projection ces éléments, on comprend vite que la guerre des 40 leaders ne fait que commencer et que des moyens encore plus importants en communication on et off-line vont être misés pour conserver leur leadership et le renforcer durablement. Leur niveau élevé d’activité leur permet de continuer à investir pour être présent à l’esprit du public, sécuriser et embellir leur image et renforcer leur marge.

Les 800 suivants n’auront qu’à bien se tenir et tenter d’émerger sachant que le cercle vicieux se met en place : pour gagner des parts de marché, il faut baisser les prix et jouer sur le différentiel pour émerger, ce qui plombe la rentabilité et donc diminue les excédents d’exploitation utiles pour investir en communication et construire la notoriété et l’image indispensables pour passer en catégorie leader. Trop de promotions tue la marque, et le mix doit être savamment dosé pour continuer de construire la notoriété et l’image du site. Quant aux sites suiveurs, seule une communication ultra-créative peut les sauver, mais sauront-ils rompre avec leurs habitudes on line internes pour inviter des nouvelles têtes extérieures à réfléchir à leur sort ? Ceux qui l’oseront s’en féliciteront rapidement : la fortune sourit toujours aux audacieux !

* Enquête annuelle Ernst&Young/Yseo auprès de 1200 clients des 10 premiers sites marchands en France.

<p>Dipl&ocirc;m&eacute; de Sup de Co Reims et de Sciences Po Paris, Denis Caminade a toujours exerc&eacute; ses talents dans [...]...

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