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4 stratégies de protectionnisme économique dans le monde passées au crible

Publié par Marion Perroud le

Substitution aux importations, boycott, régime tarifaire complexe, préférence nationale... D'un pays à l'autre, chacun mène sa propre politique pour protéger son marché intérieur, voire ses positions géopolitiques. Décryptage de quatre cas bien particuliers.

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Argentine : un nationalisme historique assumé

Avec 303 nouvelles barrières commerciales introduites depuis 2008, l'Argentine est réputée comme l'un des États les plus protectionnistes du monde. "Le pays adopte, depuis quelques années, une stratégie défensive liée à une politique économique historiquement très interventionniste et nationaliste. La nationalisation de la filiale argentine du groupe espagnol Repsol, en 2012, en est l'illustration parfaite", étaye Corinne Vadcar, analyste senior Commerce international à la CCI Paris Ile-de-France. Une situation qui s'est accentuée ces dernières années sous les effets conjugués de la crise, de la dévaluation du peso et de l'inflation élevée.

Coupé des marchés financiers internationaux depuis la crise de 2001, le gouvernement a donc décidé de renforcer encore davantage ses mesures protectionnistes. Son credo : la substitution aux importations, via le soutien aux entreprises locales (subventions, primauté des fournisseurs locaux) afin de dégager un excédent de la balance commerciale suffisant pour financer ses besoins d'investissement.

L'État a notamment multiplié les licences d'importation. "Là-bas, seule une poignée de produits importés peut circuler sans l'autorisation préalable de l'administration. Il arrive régulièrement que les marchandises stationnent pendant des semaines voire des mois à la douane", souligne Marie Albert, responsable du risque pays chez Coface. Des restrictions dissuasives qui ont été condamnées par l'Organisation mondiale du commerce en août 2014.

Inde : l'enfer de la bureaucratie en voie de normalisation

Pays protectionniste de longue date, l'Inde s'ouvre de plus en plus au commerce extérieur. Accords de libre-échange avec l'Asean ou la Corée du Sud, négociations avec l'Union européenne et le Mercosur, réduction des mesures anti-dumping... Le pays lève, une à une, les nombreuses restrictions commerciales aux importations. Dans les faits, l'accès au marché intérieur demeure encore difficile.

"Même si le pays a engagé une réforme structurelle en la matière, les méandres de la bureaucratie indienne et la complexité du régime tarifaire entravent encore les importations", note Marie Albert, responsable du risque pays chez Coface. Corinne Vadcar, analyste senior Commerce international à la CCI Paris Ile-de-France (CCIP), abonde dans ce sens : "Alors que la tendance est à la montée des obstacles non-tarifaires dans le monde, l'Inde pratique encore des droits de douane élevés, notamment sur des produits comme l'alcool".

L'administration impose, par ailleurs, encore de lourdes procédures sur les licences d'importation (ex : animaux vivants, marbre, acide borique, etc.). Afin de protéger son économie tout en la rendant plus compétitive, l'Inde maintient par ailleurs toujours plusieurs mesures de soutien à ses entreprises pouvant parfois s'apparenter à du favoritisme par rapport aux importateurs étrangers (ex : subventions, tarifs d'approvisionnement préférentiels pour les fournisseurs locaux, restrictions sectorielles, etc.).

Russie : le boycott comme arme géopolitique

Lors de son entrée à l'Organisation mondiale du commerce en août 2012, la Russie s'est engagée à abaisser ses barrières commerciales, notamment douanières. L'enlisement du conflit ukrainien en 2014, suivi des sanctions économiques occidentales (interdiction de vente d'armes, d'équipements et technologies militaires ou énergétiques, etc.), a stoppé net cette dynamique.

"En représailles, la Russie a renforcé son protectionnisme ces derniers mois, confirme Marie Albert, responsable du risque pays chez Coface. Elle a notamment mis en place un embargo sur les produits agroalimentaires en provenance de l'Union européenne jusqu'en juin 2016. Ces actions ne représentent pas seulement une riposte géopolitique. Elles constituent aussi pour le gouvernement un moyen de booster l'agriculture domestique."

Outre ces tensions politiques, exporter des marchandises en Russie demeure, à la base, relativement complexe. La Fédération est réputée pour ses barrières non-tarifaires très contraignantes, à l'instar du lourd processus de certification des produits, ou encore des procédures très strictes de conformité aux normes phytosanitaires. "Les obligations de contenu local se sont également particulièrement développées ces dernières années", constate ainsi Corinne Vadcar, analyste senior commerce international à la CCI Paris Ile-de-France. Le pays reste néanmoins ouvert au commerce extérieur (en particulier avec la Chine), qui représente 50 % de son PIB.

États-Unis : des marchés publics entravés au coeur du débat du traité transatlantique

Elles défraient la chronique depuis maintenant deux ans. Les négociations sur le Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (TTIP), ouvrant la voie à une zone de libre-échange entre les États-Unis et l'Union européenne, sont au point mort.

"De nombreux points d'achoppements subsistent notamment sur le fonctionnement des futurs tribunaux d'arbitrages qui doivent permettre à une entreprise lésée d'attaquer un État. Un autre point de blocage n'est toujours pas résolu : la libéralisation de l'accès aux marchés publics américains", détaille Marie Albert, responsable du risque pays chez Coface. "Les États-Unis sont beaucoup plus protectionnistes qu'on ne le croit souvent. Plusieurs États américains n'ont pas adopté l'Accord sur les marchés publics de l'OMC signé à l'échelon fédéral", appuie Corinne Vadcar, analyste senior commerce international à la CCI Paris Ile-de-France.

Héritées du "Buy american act", loi votée par Franklin Roosevelt en 1933, incitant l'administration à privilégier les prestataires américains, ces pratiques protectionnistes sont encore d'actualité dans nombre d'États. Depuis la crise, elles ont même été renforcées dans certains secteurs comme le celui des travaux publics. "Ces barrières sont néanmoins à nuancer, insiste Marie Albert (Coface). La taille des marchés publics américains est nettement inférieure à celle des européens, compte tenu de la très forte privatisation de l'ensemble de l'économie." Rappelant, par la même, le rang de premier importateur mondial de marchandises qu'occupent les États-Unis.

Marion Perroud

Marion Perroud

Journaliste

Entre 2012 et 2016, Marion Perroud a suivi, au sein de la rédaction de Chef d’Entreprise, l’actualité des TPE (artisans du bâtiment et [...]...

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