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Cryptomonnaies et ICO : le nouveau financement des entreprises ?

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Cryptomonnaies et ICO : le nouveau financement des entreprises ?

Les cryptomonnaies, portées par le très célèbre bitcoin, n'en finissent plus de faire parler d'elles. Même les entreprises se laissent séduire, comptant sur la réalisation d'Initial Coin Offering (ICO), des levées de fonds en cryptomonnaies, pour se financer.

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Depuis plusieurs semaines, les médias s'affolent dès que le mot "bitcoin" est évoqué. Cette cryptomonnaie, lancée en 2009 dans une grande indifférence, semblait tout juste intéresser une poignée de geeks curieux. Aujourd'hui, elle bat des records : un bitcoin équivaut à 13 500 dollars ! Surtout, elle a fait des émules : l'Ethereum, le LiteCoin, ou encore le Ripple sont apparus. Faute d'avoir saisi le coche, nombreux sont ceux qui spéculent sur la réussite avérée ou non du bitcoin et de ses acolytes.

La bimbo Nabilla conseille d'en acheter ? La tweetosphère s'affole et les analystes économiques se déchirent. Les cryptomonnaies sont-elles vraiment la nouvelle valeur marchande qui régira les échanges commerciaux ? Ce qui est sûr, c'est qu'à ce jour, elles sont une réalité économique sérieuse à prendre en compte. Mieux, certains chefs d'entreprise voient en elles le moyen de dénicher des investisseurs et, par conséquent, de développer leur entreprise. Une démarche qui tient en trois lettres : ICO.


ICO contre IPO

L'Initial Coin Offering (ICO) est un acronyme inventé en référence à l'IPO, l'introduction de sociétés en Bourse. Il s'agit d'un type de levée de fonds destiné à financer directement des protocoles blockchain. Ce terme, encore obscur pour beaucoup, désigne une technologie de stockage et de transmission d'informations. Transparente et sécurisée, elle fonctionne sans organe central de contrôle.

Selon la définition du site Blockchain France, "une blockchain constitue une base de données (BDD) qui contient l'historique de tous les échanges effectués entre ses utilisateurs depuis sa création". Cette BDD est ensuite partagée par les différents utilisateurs, sans intermédiaire, leur permettant de vérifier la validité de la chaîne. À noter qu'il existe des blockchains publiques, ouvertes à tous, et des blockchains privées, dont l'accès et l'utilisation sont limités à un certain nombre d'acteurs.

Autrement dit, les ICO servent à financer le lancement d'applications décentralisées, qui fonctionnent sur un protocole blockchain particulier. L'entreprise crée alors ses propres tokens (ou jetons), qui serviront à ses futurs investisseurs à prépayer le produit ou le service qu'elle souhaite développer. "Les ICO ont été créées pour permettre à des sociétés d'émettre leurs propres jetons, en échange de quoi elles offrent, par exemple, l'accès à des usages du projet économique, donc de la technologie adoptée", développe Franck Guiader, directeur de la division Fintech, innovation et compétitivité de l'AMF (Autorité des marchés financiers).

Prenons l'exemple d'une entreprise qui développe des espaces de stockage de mémoire informatique. Pour mettre au point sa technologie, elle a besoin de lever 10 millions d'euros. Elle émettra alors un jeton qui s'appréciera en fonction de la pertinence économique de l'entreprise. L'entreprise attribuera à son acheteur un droit d'usage et de stockage, mais elle peut aussi proposer un droit de propriété pour permettre d'intervenir dans la gouvernance de l'entreprise.


Grâce à l'ICO, les start-up de la blockchain peuvent lever des fonds en cryptomonnaies en seulement quelques minutes. En 2016, les montants récoltés via ce nouveau mode de financement avaient atteint 96 millions de dollars. Un an plus tard, plus de 4 milliards de dollars ont été levés via des ICO dans le monde. En 2018, les chiffres continuent de donner le vertige. La messagerie Telegram vient d'annoncer la plus grosse ICO à ce jour : dans un premier temps, son fondateur, Pavel Dourov, envisage de réunir 500 millions de dollars uniquement sur la phase de prévente de ses jetons. Puis, une deuxième partie de l'ICO, organisée dans le courant de l'année, devrait réunir entre 3 et 5 milliards de dollars.

"Ces financements doivent être vus comme le témoignage d'une réalité économique numérique, ajoute Franck Guiader. En réalisant leur ICO, les entreprises s'adresseront à une communauté d'acheteurs de "tokens" qui peut être très variée. Elles gagneront aussi en visibilité dans le domaine numérique." Au-delà du ­f­­inancement, les ICO permettent de développer des axes de communication auprès de populations qui, lorsque les opérations sont conseillées et orientées vers des acheteurs technophiles, parlent un langage commun.

560 millions de jetons vendus en un mois

En France aussi, les entreprises se laissent séduire par les ICO. DomRaider, une start-up spécialisée dans la revente de noms de domaines expirés, est l'une d'entre elles. En annonçant son ICO en septembre 2017, elle s'inscrit parmi les pionniers de l'Hexagone. "Nous nous sommes aperçus qu'il n'existait pas de solutions qui permettent, facilement et universellement, de vendre des biens dématérialisés aux enchères, en l'occurrence des noms de domaine. Grâce à l'évolution de la technologie blockchain, nous pouvions créer une plateforme décentralisée pour gérer n'importe quelle vente aux enchères dans le monde. Mais pour assurer ce développement, nous avions besoin de financement", partage Tristan Colombet, dirigeant de DomRaider.

En l'espace de quelques semaines, la start-up française mobilise toute son équipe (soit une trentaine de collaborateurs) et fait appel à quelques prestataires externes pour les aspects les plus techniques de la blockchain. L'entreprise organise l'émission de son jeton : le DomRaider Token. En un mois, la totalité des 560 millions jetons est vendue auprès d'investisseurs issus de 114 pays différents. "Cette formule a le mérite d'être très internationale. Contrairement à une levée de fonds traditionnelle, elle permet de s'affranchir des frontières traditionnelles et de toucher une communauté d'investisseurs beaucoup plus large", approuve Tristan Colombet.


Les ICO sont-elles donc l'opportunité tant attendue des entreprises pour se financer ? Ou un miroir aux alouettes ? Contrairement aux placements en Bourse, aucun organe de contrôle ne régule le marché des cryptomonnaies. Très volatiles, les cours sont liés à une forte spéculation et ils peuvent baisser ou augmenter en quelques heures à peine. De plus, les cryptomonnaies ne répondent à aucune définition juridique et leur cadre fiscal est inexistant. "Une action ou une obligation, ce sont des instruments financiers que l'on connaît. Pas le token. C'est un objet juridique non identifié. L'inconvénient des cryptomonnaies, c'est qu'elles n'ont pas de marché officiel", met en garde Thierry Vallat, avocat au barreau de Paris et spécialiste du numérique.

Il existe des plateformes diverses et variées : certaines permettent d'acheter des jetons mais pas forcément de les revendre, d'autres de faire les deux. "Ce sont des plateformes qui ne répondent à aucune réglementation. C'est pourquoi l'univers des cryptomonnaies reste dans l'incertitude. Il y a une possibilité de tricherie, de fraude et d'escroquerie", poursuit-il.

Vers des pistes de régulation

L'AMF a donc lancé à l'automne 2017 une consultation sur les ICO et leurs implications juridiques. Elle en a déduit que la majorité des opérations sont en dehors de toute réglementation et qu'une minorité d'entre elles pourrait relever du droit actuel. En parallèle, l'organisme a lancé un programme d'accompagnement et de recherche des levées de fonds en cryptomonnaies, baptisé Unicorn, pour "Universal node to ICO's Research & Network".

Trois propositions en ont émergé : la réalisation d'un guide de bonnes pratiques ; la requalification de certaines opérations dans le droit constant ; une réglementation ad hoc, rédigée, inspirée des régimes actuels mais adaptée à ce monde numérique. "Notre objectif est de consulter toutes les parties prenantes de l'écosystème (avocats, opérateurs, observateurs technologiques) sur cette réalité que sont les ICO. Unicorn vise alors à observer le développement de ces innovations pour qu'elles s'inscrivent à terme dans un cadre sécurisé et adapté", précise Franck Guiader.

L'AMF recevra ainsi les initiateurs (entrepreneurs français ou étrangers) de différents types de projets. Elle pourra approfondir son expertise juridique et économique des opérations réalisées et étudier leurs implications dans l'économie traditionnelle. Le train des cryptomonnaies semble bel et bien lancé.

Pour Jean-François Faure, fondateur de VeraCash, société spécialisée dans les monnaies complémentaires, les cryptomonnaies témoignent aussi de la volonté d'envisager de nouveaux systèmes financiers. "Monnaies locales, monnaies d'entreprise, cryptomonnaies... Le bitcoin a ouvert la voie à des systèmes complémentaires. Ce sont des actifs qui ne sont pas émis ni dirigés par des États ou des systèmes financiers. C'est intéressant et ce n'est qu'un début. Ces monnaies "open source", dont les règles sont inventées par leurs propres utilisateurs, sont peut-être l'une des solutions aux problématiques du monde occidental qui envisage désormais les limites de son modèle économique", prédit-il.

Trois entreprises françaises qui ont réussi leur ICO

DomRaider est spécialisée dans la revente de noms de domaine expirés. Pour assurer son développement, elle a vendu en septembre dernier 560 millions unités de son jeton, le DomRaider Token.

iEx.ec est une start-up lyonnaise spécialisée dans le cloud distribués, sorte de "AirBnB des serveurs informatiques". En avril 2017, elle lève 10 000 bitcoins en seulement trois heures. Les investisseurs ont reçu en échange des RLCs, le token conçu par iEx.ec., qui leur permettra d'accéder aux ressources et aux applications fournies par la plateforme.

Beyond the Void est une start-up de jeux vidéo développé sur la blockchain. Il utilise une crypto-monnaie baptisée Nexium, qui permet notamment d'acheter des artefacts à l'intérieur même du jeu. L'ICO de Beyond the Void, lancée en novembre 2016, a permis de réunir 110 000 euros.

 
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