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Harcèlement moral : comment sécuriser une rupture conventionnelle ?

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Harcèlement moral : comment sécuriser une rupture conventionnelle ?

Les salariés dénonçant une situation de harcèlement moral ou de souffrance au travail sollicitent de plus en plus une rupture conventionnelle à leur employeur. Mais une telle rupture n'est pas sans risque : il est essentiel pour l'entreprise de la sécuriser.

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La sécurisation d'une rupture conventionnelle passe nécessairement par le respect des étapes clés de la procédure. Voici les 5 étapes pour la conclure en toute sérénité.

Etape 1 : s'assurer du libre arbitre du salarié

Certes, aucun formalisme particulier n'est exigé pour lancer des négociations, mais pour autant l'écrit reste indispensable. Il permet de garder une trace de la demande du salarié et de la réponse apportée. Dès lors vous demanderez au salarié de solliciter un entretien par mail ou par courrier.

Pour favoriser un consentement libre et éclairé, la loi laisse du temps à la négociation.

Une convocation en bonne et due forme sera adressée. Elle mentionnera, outre la date et le lieu de l'entretien (de préférence pendant les heures de travail ou plus discrètement en dehors des heures de travail du salarié et dans ce cas, sauf exception, il ne sera pas naturellement rémunéré).

Dès le premier entretien, celui-ci peut se faire assister, soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, soit en l'absence d'institution représentative du personnel dans l'entreprise, par un conseiller choisi sur une liste dressée par le préfet de région(1).

Etape 2 : organiser les entretiens avec la méthode QQOQCP

La négociation peut aboutir soit en un entretien (minimum pour signer une convention de rupture), en vue de signer les deux documents contractuels lors d'un second entretien. Parfois, plusieurs rencontres seront nécessaires.

Le premier entretien sera l'occasion de faire une proposition chiffrée(2) au salarié et de lui rappeler, outre ses droits en matière d'allocation chômage, tous les avantages qu'il peut avoir à signer une telle rupture.

La rupture conventionnelle doit s'inscrire dans climat serein pour pouvoir être menée à son terme et il convient de proscrire de part et d'autre les griefs, les règlements de compte et l'affectif.

D'où l'intérêt de mettre à profit la méthode QQOQCP aussi appelée la méthode de questionnement.

Qui ? Le DRH et le salarié avec l'aide éventuelle d'avocats

Quand ? A quelle date la rupture prendra-t-elle effet ? Il est tout à fait possible de s'entendre pour un départ plus tardif si certaines nécessités de l'entreprise l'imposent.

? Dans le bureau du DRH ou chez un avocat.

Quoi ? La rupture du contrat de travail dans des conditions permettant le versement de sommes bénéficiant d'un traitement social et fiscal favorable.

Comment ? Les modalités (expliquer en détail les étapes de la procédure) et une obligation mutuelle de confidentialité sur les échanges.

Combien ? Solde de tout compte estimé, indemnisation proposée, " out placement " pris en charge par l'entreprise, devenir de la clause de non-concurrence, sort des avantages en nature tels que véhicule de fonction, matériel informatique, logement de fonction, etc.

Si les négociations échouent, signez un procès-verbal mentionnant l'échec ou faites un courrier lapidaire en ce sens.

Etape 3 : matérialiser l'accord des parties

Matérialiser l'accord des parties passe par une convention de rupture conforme au modèle Cerfa(3) fixé par le ministère de travail à laquelle est jointe la demande d'homologation. Il doit être daté et signé, avec la mention manuscrite " lu et approuvé ", par l'employeur et le salarié.

Utiliser TéléRC permet d'effectuer une demande d'homologation de rupture conventionnelle d'un(e) salarié(e) en contrat à durée indéterminée (CDI) avec une garantie de qualité de remplissage de votre dossier et un traitement rapide de votre demande par l'administration.

Rien n'interdit de signer la convention durant l'entretien, la loi n'ayant prévu le respect d'aucun délai entre la tenue de celui-ci et la signature des parties(4). Une fois ceci effectué, vous prendrez soin de remettre un exemplaire de la convention au salarié et lui faire signer une décharge.(5)

Etape 4 : éventuellement, se rétracter

A compter de la date de la signature de la rupture conventionnelle, chacune des deux parties dispose d'un délai de 15 jours calendaires pour se rétracter. A priori, l'employeur, sauf découverte d'une faute grave ou violation par le salarié de son engagement de confidentialité, n'a aucune raison de se rétracter. En revanche le salarié peut souhaiter renégocier la rupture et il est suggéré d'en prendre acte et de ne pas persévérer (à l'impossible nul n'est tenu !)

Etape 5 : adresser au Direccte le dossier de demande d'homologation

La rupture ne peut intervenir que le lendemain de l'homologation soit dans un délai de 15 jours ouvrables. A défaut de notification avant l'expiration de ce délai, l'homologation est réputée acquise et l'autorité administrative est dessaisie. En cas de refus d'homologation, le Direccte informe l'employeur et le salarié dans les 15 jours suivants la réception de la demande.

Points de vigilance

L'existence de faits de harcèlement moral n'affecte pas en elle-même la validité de la convention de rupture(6), mais encore faut-il s'assurer en premier lieu du consentement libre et éclairé du salarié.

Toutes les précautions devront être prises en amont pour garantir la liberté de consentement du salarié comme en prévoyant plusieurs entretiens menant à la signature de la convention, s'assurer que le salarié y soit représenté, ou encore vérifier que l'état psychologique du salarié ne fait pas obstacle à la conclusion de la convention de rupture (attestations médicales) et surtout s'assurer de l'absence d'un contexte de harcèlement entourant la conclusion de la convention.

Lors la rédaction de la convention, même si seul le Cerfa suffit en théorie en pratique, il vaut mieux signer un protocole détaillé afin de se prémunir contre un éventuel vice du consentement ou de mieux contester judiciairement le refus d'homologation motivé par le Direccte.

Surtout n'intégrez aucune clause par laquelle les parties renonceraient à toute autre action en lien avec l'exécution ou la cessation des relations contractuelles, car elle serait nulle(7).

Pour en savoir plus

Patricia Gomez Talimi, avocate associée chez PDGB. Spécialiste en droit du travail et droit de la protection sociale


Amélie Engeldinger, avocate associée chez PDGB.





(1)S'il entend user de cette faculté, il faut lui rappeler d'en informer auparavant la direction laquelle pourra alors décider de se faire assister. Si tel est le cas, il est conseillé de l'indiquer dans le courrier de convocation indiquant le nom de la personne qui assistera l'Employeur.

(2)En tout état de cause, la Direction doit avant le premier entretien faire une estimation des droits légaux et conventionnels du salarié ainsi que des éventuels risques judicaires si la rupture conventionnelle est une alternative à une prise d'acte, à une démission avec griefs, ou encore à un licenciement.

(3)Lorsque la rupture conventionnelle concerne un salarié protégé, c'est l'inspecteur du travail qui est compétent, non pour homologuer la rupture, mais pour l'autoriser sur la base d'un formulaire spécifique dont le but est de permettre à l'inspecteur de s'assurer de l'absence de toute pression de l'employeur se rattachant notamment à l'exercice du mandat.

A noter que la procédure de consultation du comité social et économique (CSE) doit être, le cas échéant, respectée.

Le courrier d'accompagnement devra, selon nous, mentionner ces informations et être accompagné, le cas échéant, du procès-verbal de la réunion du CSE au cours de laquelle il a donné son avis sur le projet de rupture conventionnelle.

(4)Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt n 1275 du 3 juillet 2013, Pourvoi n 12-19.268

(5)Cour de cassation, Chambre sociale, 23 septembre 2020, n° 18-25.770

(6)Cass. soc., 23 janv. 2019, n 17-21.550

(7)Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt n 1212 du 26 juin 2013, Pourvoi n 12-15.208 ; dans ce cas libre à vous de signer avec le salarié une transaction qui traiterait des conditions d'exécution du contrat de travail et permettrait de purger le passé ( rappel d'heures supplémentaires par exemple).


 
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