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Entrepreneuriat : où sont les femmes ?

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Une progression lente

Une dynamique qui commence petit à petit à porter ses fruits. "Il y a dix ans, quand on évoquait l'entrepreneuriat féminin, on parlait seulement de TPE, de micro­crédit et d'économie solidaire. Aujourd'hui, l'écosystème a perçu l'intérêt économique de soutenir les entrepreneuses. De plus en plus de projets ambitieux et innovants émergent", constate Frédérique Clavel, fondatrice de Paris pionnières en 2005.

Le classement annuel des 50 PME de croissance dirigées par des femmes, établi par l'association Women Equity for Growth, en est l'illustration parfaite. L'édition 2014, dévoilée en décembre dernier, montre la diversité des profils de créatrices et repreneuses se positionnant aussi bien sur le secteur de la santé (Horus Pharma, Dyomedea), du bâtiment (Solorpec, Isore Bâtiment) que de l'industrie (Thimonnier, Fragonard).

Par ailleurs, "l'écart entre hommes et femmes semble s'estomper chez les jeunes générations d'entrepreneurs", note Séverine Le Loarne. Reste que, dans les faits, "les chiffres ne progressent pas significativement", regrette Eva Escandon, présidente de l'association Femmes Chefs d'entreprise. Si la part de créatrices d'entreprises individuelles a légèrement progressé passant de 33 % en 2004 à 38 % en 2014, "cette hausse semble surtout liée à l'instauration du régime de l'auto-entrepreneuriat", estime Frédérique Clavel.

Malgré tous les dispositifs de soutien à ces entreprises, seules 8 % de sociétés innovantes sont aujourd'hui dirigées par une femme. En cause bien souvent, l'auto­censure des femmes elles-mêmes. 70,5 % d'entre elles considèrent l'entrepreneuriat comme un bon choix de carrière (vs 70,1 % des hommes) mais seules 6 % ont l'intention de se lancer, contre 10,5 % des hommes. Seules 3 % des Françaises le font contre 6 % au Royaume-Uni ou 10 % aux États-Unis. Contrairement à une idée reçue, ce n'est pas tant la conciliation des temps de vie qui les bloquent mais le manque de confiance en elles et la peur de l'échec.

Une posture qui les pousse aussi à commencer leur activité avec moins de capitaux. Séverine Le Loarne va plus loin : "La femme française est enfermée dans un rôle modèle de superwoman, du travail à la maison en passant par son couple. Ce sont des postures incompatibles qui peuvent les bloquer surtout lorsqu'elles entreprennent."

Dans une enquête réalisée avec le Réseau entreprendre, la chercheuse a notamment mis en évidence leur difficulté à déléguer et à se dégager de l'opérationnel pour se concentrer sur le stratégique. Si bien que les structures fondées par des femmes restent, en moyenne, plus petites en termes de chiffre d'affaires et de nombre de salariés que celles créées par les hommes.

Et demain ?

Alors que faire pour changer réellement cette situation ? "Il faut sensibiliser les jeunes le plus tôt possible à l'entrepreneuriat mais aussi à la mixité des métiers. Nous souffrons d'un déficit de modèles qui n'incite pas les filles à se lancer", insiste Eva Escandon. Elle, en est persuadée, c'est par une orientation scolaire plus paritaire que se jouera le reste.

Par ailleurs, si beaucoup est entrepris pour récompenser les rares femmes qui se lancent, les institutions et médias ont encore de sérieuses marges de progression dans la valorisation des dirigeantes. "C'est bien de multiplier les prix récompensant les entrepreneuses mais ce qui compte, c'est qu'elles soient plus présentes dans les tribunes des journaux et les concours mixtes", pointe Frédérique Clavel, qui milite par ailleurs pour l'instauration de quotas de femmes assortis de sanctions, dans les processus de sélection des programmes d'aides aux créateurs.

Au-delà de l'incitation à la création, "la priorité est aussi surtout de travailler sur l'accompagnement sur la durée", appuie Séverine Le Loarne (Grenoble École de Management). Car, comme le souligne Anne-Laure Constanza, à la tête du site marchand Envie de Fraises, "le plus dur en France n'est pas de créer mais de se développer et franchir le cap des premières années d'activité".

L'autre enjeu majeur sera celui de la reprise d'entreprise par les femmes, selon la secrétaire d'État Pascale Boistard. "Des milliers de sociétés disparaissent chaque année faute de repreneur. Les femmes ont un rôle à jouer pour inverser la donne, à condition qu'on leur laisse aussi la chance d'accéder à des responsabilités à l'intérieur même des entreprises."

À l'intérieur certes, mais aussi à l'extérieur. "Elles sont sous-­représentées dans les réseaux d'entrepreneurs et les mandats économiques, comme les organisations patronales, les CCI ou les conseillers de prud'hommes. Il faut les inciter à s'investir et à donner une nouvelle couleur aux décisions et aux évolutions des territoires et de l'économie française."

Car, plus qu'une "simple" question d'égalité, l'entrepreneuriat féminin est aussi et surtout un combat pour la démocratie.

 
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Marion Perroud

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