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Devenez un manager “bricoleur”

Publié par Claire Poisson le - mis à jour à
Devenez un manager “bricoleur”

Célébré dans les pays anglo-saxons, le “bricolage managérial” est plus difficile à faire accepter en France. Pourtant, ce type de management permet d'être réactif et de faire face plus facilement aux aléas liés à la crise.

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Celui qui “bricole” en entreprise a souvent une image négative. Pourtant, le bricolage managérial a de nombreuses vertus ! C'est ce qu'explique Raffi Duymédjian(1), professeur chercheur à l’École de management de Grenoble : « En France, “la débrouille”, le fait de “faire avec” sont encore considérés comme des moments ponctuels, des accidents de parcours, qui, s’ils se répètent, risquent de mettre en péril la rigueur et la lisibilité du système. » Cette notion fait pourtant référence à des compétences fondamentalement positives dans les pays anglo-saxons, dans des domaines aussi variés que l’innovation, l’entrepreneuriat, des systèmes d’information… Le manager bricoleur est donc un profil précieux pour une entreprise, mais qui peine encore à être légitimé, sans doute en raison d’un problème de sémantique qui, dans le monde professionnel, renvoie le bricolage à une forte image négative.

Le manager bricoleur est notamment capable d’associer les personnes en reconnaissant leur polyvalence, et ce pour un travail pour lequel elles n’ont pas forcément été embauchées. « Le bricoleur touche à l’approximatif, précise Raffi Duymédjian. Il ajuste en permanence ses moyens et ses ressources. Il “fait avec ce qu’il a” en termes de moyens humains ou matériels. »  Il mêle ainsi la proximité (entretenir un rapport de familiarité avec son environnement), la connectivité (être capable d’associer telles et telles ressources), et la créativité (trouver des rapprochements ingénieux, imaginer des utilisations détournées).

« Les PME-PMI sont d'ailleurs les plus aptes à développer cette culture du bricolage, indique Raffi Duymédjian, puisqu’elles connaissent la pénurie et savent donc aller chercher les ressources partout. » De plus, elles font de la proximité, que ce soit en interne ou avec les clients, un atout de leur performance. Et elles savent développer la polyvalence, voire la “polyfonctionnalité” de leurs salariés.

Utiliser les compétences personnelles de ses collaborateurs

Le bricolage permet de trouver des solutions qu’une approche managériale plus traditionnelle aurait écartées. Le chef d'entreprise bricoleur pourra par exemple mêler les connaissances de deux domaines visiblement distincts, ou encore assembler des équipes aux compétences hétéroclites pour lancer une nouvelle activité sans avoir nécessairement de plans clairs en tête, mais en privilégiant l’expérimentation par la pratique.

Autre exemple, votre comptable est peut être dessinateur à ses heures perdues. Alors, pourquoi ne pas lui demander de s’essayer au relooking de la plaquette commerciale de l’entreprise ? Un manager qui procède ainsi valorise l’expérience de chacun. « Le manager bricoleur a tout intérêt, complète Raffi Duymédjian, à aménager dans l’entreprise des plages de détente, qu’il s’agisse de la machine à café ou d’une salle de repos. Elles favoriseront le dialogue et chacun pourra s’enrichir de l’expérience de l’autre. »

Cependant, il existe quelques freins à ce type de management. « En raison de sa nature, rappelle Raffi Duymédjian, il accentue les difficultés de gestion de la relation entre la vie privée et la vie professionnelle. Or il existe des limites à afficher sa volonté à utiliser le privé dans le milieu professionnel. » Parallèlement, on ne peut pas appliquer le bricolage lorsque l’on est dans un processus de production de pièces de qualité standard à grande échelle. Il est aussi parfois difficile de gérer la transition entre un prototype bricolé et son industrialisation.

Malgré tout, faire rentrer un peu de “bricolage managérial” dans l'entreprise permet de posséder des aptitudes particulièrement utiles. D'autant plus en temps de crise, où les sociétés sont soumises à des ruptures qui perturbent leur organisation : pénurie de ressources ou de temps, problèmes de trésorerie, rupture de stock… Dans une telle situation, le manager bricoleur développe une capacité de résilience, car il s’appuie sur un réseau d’individus et de ressources qu’il connaît très bien, lui donnant ainsi la confiance nécessaire à la réalisation de ses missions. « L'entreprise dépense moins, révèle Raffi Duymédjian, puisqu’elle revalorise le plus souvent des ressources qui n’ont plus de valeur comptable. »

Ce bricolage permet également d'enrichir des rapports entre les équipes, souvent distendus dans les périodes difficiles. Et puis lorsqu'un manager bricole, il met de lui-même, il s’identifie plus facilement et se reconnaît dans ce qu'il fait. Et cela participe au bien-être au travail. Un manager bricoleur est une personne capable de faire beaucoup avec peu. Elle saura être polyvalente, souple, réactive, arranger et ajuster les choses avec peu de moyens. Bref, des talents utiles en temps de crise.

(1) Raffi Duymédjian et Charles-Clémens Rüling, professeurs au département Hommes, Organisations et Société à Grenoble École de management, ont publié un article sur le bricolage managérial dans la revue Organization Studies et mènent des recherches sur le sujet depuis 2003.

 
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